Tandis que la plupart des Français festoieront sous peu, l’hôpital ne sera pas à la fête. C’est chaque jour que, partout dans le pays, un établissement annonce la fermeture de l’un ou l’autre de ses services, et bien souvent celui des urgences, d’abord la nuit, parfois toute la journée.
Malgré (ou peut-être à cause de) la pléthore des organismes sanitaires, difficile de se faire une idée du nombre de lits fermés en pleine épidémie, faute de personnel soignant. Pour la Fédération hospitalière de France, ce serait 6 %, pour l’Assistance publique – Hôpitaux de Paris 13 %, mais 20 % selon le Conseil scientifique. Et pour la seule réanimation, on parle de 10 %.
Allez vous y retrouver quand nul n’est dénué d’arrière-pensées politiques ! Mais ce qui est sûr, c’est que ça va mal se passer, et que ça vient de loin.
Avant les 35 heures, le chevauchement des équipes permettait la transmission orale des informations importantes. Depuis qu’elles ne se croisent plus que brièvement dans les vestiaires, tout doit avoir été écrit par celle qui part, puis tout lu par celle qui arrive. Perte de temps pour les deux et retard d’information sur les cas alarmants, cas d’école de l’effet pervers de l’accouplement monstrueux de la judiciarisation et du principe de précaution.
Puis la gestion financière des hôpitaux impliquant une bureaucratie croissante, celle-ci se fit au détriment des embauches de soignants, mais face à une population qui s’accroît et qui vieillit. La charge de travail de ceux qui reste augmente pour compenser, entraînant surmenage, arrêts de travail puis vrais burn out, début d’une spirale infernale.
Pour affûter la gestion hospitalière sur le modèle flux tendu des entreprises, les infirmières sont aussi de plus en plus soumises à un jeu de chaises musicales, consistant à les déplacer de services en services en fonction de besoin du moment. Ainsi, à peine assimilés les soins à donner aux parturientes, on peut se retrouver le lendemain en neurochirurgie…
À cette situation déjà périlleuse se sont ajoutées deux années d’épidémie qui frappèrent certains soignants – pas tous à mort, certes, et heureusement -, mais avec son lot d’arrêts de travail et de cas contacts en isolement, accélérant la spirale déjà évoquée.
On comprend qu’il ne faut pas longtemps à une jeune infirmière, au salaire modeste, pour aspirer à une vie professionnelle plus apaisée et moins stressante, lesquelles ne manquent pas dans les administrations, les services de médecine du travail, les EHPAD, les établissements scolaires, etc., et depuis quelques mois dans les « vaccinodromes » qui proposent, de surcroît, des rémunérations de rêve.
Aujourd’hui, la Direction générale de la santé constate qu’en l’état actuel des effectifs, il sera impossible de gérer l’afflux de patients qui menace pour Noël, et suggère donc de réquisitionner les soignants. Un moyen très sûr d’encourager encore les démissions…